migrants assis, attendant de passer la méditerranée en AfriqueA LA UNE AFRIQUE 

Afrique: Le continent continue de perdre ses fils dans la méditerranée.

Croyant fermement que l’eldorado, se trouve en Europe, un jeune ivoirien, Traoré, est allé mourir en méditerranée . Notre visite chez ses parents.

Moustapha Traoré: Une vie brisée dans la méditerranée

Il est neuf (9) heures quand l’équipe de reportage de Business actuality foule le sol d’Aboisso. Située à 2 h de route d’Abidjan,  Aboisso est la capitale de la région du sud comoé. Les travaux de l’autoroute Abidjan- Lagos ont considérablement embellis le centre ville de la capitale du Sanwi. Notre guide nous invite à le suivre. Il nous informe que la famille de Traoré Moustapha a accepté de nous recevoir. À bord d’un véhicule affrété par la direction de notre journal, nous nous rendons à « sokoura », le quartier où habite la famille du défunt aventurier.

Après les civilités, Mme Traoré mère du jeune Moustapha accepte de témoigner. En effet, Moustapha est mort selon plusieurs témoins en sauvant ses amis passés par dessus bord et qui ne savaient pas nager. À Sokoura où il vivait, Moustapha ne cachait point sa volonté d’aller s’installer en Europe. Son avenir, il ne l’entrevoyait nulle autre part sur le vieux continent. Moustapha ou  » Tafa » comme on le surnomme, n’avait d’yeux que pour l’Occident. Alors quand après plusieurs années d’épargnes et de sacrifices, il fut enfin prêt, plus rien ne pouvait le retenir pas même sa mère encore moins sa petite amie. 

L’Occident, ce sont les opportunités. Rien à voir avec la vie misérable et sans avenir que nous menons ici disait t- il. En effet, Tafa était un menuisier. Il travaillait dans une scierie et gagnait à peine 60 000 F CFA environ 92 euros par mois. Il savait qu’en Europe pour la même activité, il gagnerait 100 fois plus. Donc depuis plusieurs années il entreprit de mettre de coté de l’argent pour financer son voyage. Pour lui, son salut et celui de sa mère résidaient dans la traversée de la méditerranée.

Une famille inconsolable.

Après quelques minutes d’entretien, Mme Traoré fond en larme. Elle nous indique qu’à maintes reprises, elle a tenté de l’en dissuader. Mais c’était sans compter la détermination de son fils. Notre guide, nous fait signe d’arrêter l’entretien. En effet la mère de Moustapha est visiblement trop affectée pour poursuivre la conversation nous explique t-‘il.

Dans le quartier sokoura où Moustapha a passé toute son enfance, tous sont unanimes, ce jeune homme était quelqu’un de bien. Brave, courtois et travailleur. Moustapha avait pour habitude de s’attabler au café du quartier pour prendre un thé à sa descente du travail. 

La dernière  conversation téléphonique de Moustapha.

Nous rencontrons Denise, une amie de Moustapha. Elle nous raconte l’entretien qu’elle a eu avec lui quelques jours avant sa disparition. Il s’agit d’un entretien vidéo « via whatsapp ». Elle nous relate les faits.  –  Bonjour Denise, c’est moi moustapha. –  Oui Tafa. Comment vas tu? Mais pourquoi m’appelles tu à partir d’un endroit aussi mal éclairé. – C’est fait à dessein, c’est pour ne pas que l’on puisse identifier l’endroit comme nous sommes en conversation vidéo. – Ok. Tu sais ta mère ici ne fait que te demander. Où es-tu exactement ?  – Je ne puis te le dire. Mais il faut absolument que je rentre dans le pays d’abord. Chaque fois que j’appelle maman, elle pleure, elle veut me voir. Mais je ne peux pas tant que je ne suis pas rentré. Tu sais l’Europe c’est l’idéal, je dois y aller pour « me chercher » ( me réaliser). Puis la communication ‘s’interrompt. Un mois plus tard, des témoins annoncent  la mort du jeune homme dans la méditerranée.

Morts en méditerranée: Silence complice des autorités africaines ?

 Devant une telle tragédie, c’est le mutisme total des chefs d’Etats africains. Après le timide réveil des dirigeants africains au lendemain du reportage de la chaîne américaine CNN sur la vente d’exclaves en Libye, c’est le calme plat.

Chaque année ce sont plusieurs dizaines de milliers d’africains qui périssent dans le cimetière bleu et dans l’indifférence totale des politiques du continent noir. Simple mépris ou aveu d’impuissance, chaque année plusieurs vies de jeunes africains  sont brisées dans la méditerranée. En Côte d’Ivoire par exemple, entre le système éducatif inapproprié, taux de chômage oscillant entre 70 à 90 % (selon les chiffres de la BAD), corruption et la guerre civile de 2002 à 2011 qu’elle a connu, jeunes filles et garçons, parfois, des enfants, ne voyant aucune perspective pour leur avenir, tenter l’aventure vers l’Europe. L’ampleur est telle, que nous ne comprenons pas le silence de l’union africaine, de l’ONU.

Yacouba Sanago

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