France: Nous avons perdu un être cher.
Le cœur à combien de places pour supporter la tristesse? Ce cœur a combien de places pour rejeter la disparition des êtres si chers? Ce matin, la lourdeur se mêle au chagrin pour faire naître le regret et tout s’effondre autour de moi, autour de nous. Ce matin, mon téléphone sonne mais au bout, la peine est si lourde parce que la femme de mon oncle, qu’on a laissée à Paris dans des conditions d’une athlète bien aguerrie, on nous annonce son décès, si brutal.
Pour tous ceux qui sont sur ce chemin si lourd, parce qu’ayant perdu un parent si cher, qui ont rendu l’âme, j’ai une pensée pieuse pour leur départ. Je suis triste et je voudrais qu’au travers de ces lignes, ma douleur puisse être ressentie par toi qui me lis car, c’est ta compassion qui peut raser ce chagrin. Brigitte Ané, le grand portail que j’emprunte pour escalader ces quelques petits escaliers si je ne veux pas emprunter l’ascenseur et qu’à la porte, elle m’accueille avec sa petite voix polie, rassurante, affectueuse, disponible et humaine, la cloche de l’entrée, me permet de me fondre dans l’enceinte de ce salon dont son mari seul a le secret de le rendre propre et bien rangé. Mon seul lieu qui me permet d’être à l’aise, le long fauteuil royal et elle se met à ma disposition.
Sous le regard affectueux, encourageant et aimable de son cher époux Ané Roger qui est mon oncle à moi, Brigitte court dans tous les sens de sa cuisine pour me ramener mon croque monsieur avec un verre d’eau ou un thé bien chaud, pendant ce temps, son mari et moi, sommes lancés dans les causeries fondées sur l’actualité ivoiro-africaine. Très souvent, Brigitte nous donnait l’impression de ne pas nous épier, mais il y a des sujets sur lesquels son mari lui tire quelques savoirs et elle en savait des tonnes. Brigitte est partie pendant que son mari, mon oncle, vient d’arriver sur les bords de la lagune ébrié. Une grande étoile vient de s’éteindre et son trou noir restera noir et dans les cœurs et dans l’immeuble.
Mes jambes m’en tombent encore et j’ai du mal à y croire, elle n’était point malade comme ce fut le cas de ton parent à qui, tu as à peine parlé et qu’on t’apprend que son souffle lui a été arraché par la mort. La brutalité avec laquelle ces choses se passent, on a cette impression que tout est fichu car reconstruire encore une vie, c’est comme, remplir un océan. Je me mets à la place de son unique fils, Cédric Ané, dont elle a contribué à le rendre grand, dans la grandeur des hommes, c’est lui, hélas qui, avec courage, effectue les tâches tristes pour nous annoncer la fin des fins de sa mère, Brigitte Ané.
Ané Roger, tout comme bien d’autres se trouvant dans ces cas de figure de tristesse, ayant perdu des êtres si chers, vous n’avez pas idée de ce que ces disparitions nous peinent, mais hélas, les seuls moments où on part seul, si ce ne sont que des larmes chaudes qui expriment souvent le chagrin et la profonde peine. Quant à mon oncle Ané Roger, il fait tout pour donner l’impression par la jovialité qui transcende son visage, mais l’émotion lui arrache un fond profond de regret. Il vient de perdre sa femme, sa moitié, sa complice, sa béquille, son soupape.
A l’idée de savoir que demain, nous serons à nouveau à Paris, tout précisément à Clichy, sur le boulevard Victor Hugo, sans notre Brigitte, c’est encore une vallée qui s’assèche pour nous empêcher de nous abreuver dans la source dont j’avais cru intarissable de notre Brigitte qui est partie avec le secret de sa féminité légendaire. Je la revois encore nous rejoindre en revenant de ses courses, mon cher oncle, on finira jamais de pleurer ta moitié, mais à l’impossible nul n’étant tenu, que ce grand ciel soit le nouvel habitat de ta moitié et que la terre lui soit légère.
Tata, mémé, chérie, désormais, ce sont ses portraits que nous regarderons, pendant ce temps, elle serait en train de rechercher ses premiers parents qui sont partis et que ceux-là, la reçoivent car d’ici bas, je n’ai rien à lui reprocher, qu’elle parte, qu’elle s’en aille avec cette pureté de son coeur, pour que son voyage lui soit paisible. Brigitte Ané, madame Ané, je vais m’arrêter là, pour te permettre de partir. Adieu, la moitié de mon oncle Ané Roger.
Joël ETTIEN
Directeur de publication : businessactuality.com