samedi, mai 17, 2025
CÔTE D'IVOIRE

La présidentielle 2025 à l’épreuve du discours politique

Le cardinal Joseph Ratzinger, futur pape Benoît XVI, écrivait en 2005 que le christianisme doit toujours se souvenir qu’il est la religion du logos. Logos désigne le rapport entre l’homme et Dieu via un discours rationnel et cohérent. Nous appuyant sur cet écrit, il ne serait pas incongru de dire que la politique est intimement liée au logos ou du moins qu’elle fait du logos sa religion.

De politique, à propos de la vie politique ivoirienne, il ne serait pas surérogatoire de la résumer en ce triptyque logos, praxis et violence. Quelle en est la raison profonde ?

Le logos, compris comme discours dans la philosophie platonicienne, est considéré comme la raison du monde, comme contenant en soi les idées éternelles. C’est aussi un concept à la fois rationnel et oratoire. Pour preuve, dans l’art rhétorique, le logos relève de la démonstration, de la raison et de l’argumentation. La praxis est comprise comme pratique sociale pour comprendre la société et la transformer. La praxis a une finalité interne à l’action, non séparable de l’action. Au sens d’action sous-tendue par une idée vers un résultat pratique, elle désigne l’ensemble des activités humaines susceptibles de transformer les rapports sociaux et/ou de modifier le milieu naturel. La violence comme phénomène social légitimée au nom d’un objectif politique par l’utilisation de la force pour contraindre, dominer, tuer, détruire ou endommager.

De cette compréhension trilogique, il est à comprendre que la vie politique ivoirienne des trois dernières décennies est encadrée dans ce triangle.

De politique, certains font de cette vie politique une essence spécifique et même permanente. Or, parler d’essence, c’est parler de substance et ce qui tient l’existence de l’homme. On pourrait parler dans l’imagerie populaire de carburant, ce qui fait avancer l’humanité. Qui dit carburant, c’est-à-dire ce qui fait avancer parle d’énergie ; énergie comme force. Ainsi, ce qui fait avancer prend le vocable de production ; donc économie. Qui dit économie, parle de richesse et patrimoine. Qui dit richesse et patrimoine, dit gestion. Or, toutes ces déclinaisons sont adossées à la violence. La violence est la richesse dont l’homme a le monopole. La quête du pouvoir entraîne la violence. Le discours entraîne la violence. La quête de la richesse en termes de patrimoine entraîne la violence. Ainsi dit, tout système politique est en fait un mode de gestion de la violence. Quand il n’en crée pas, il la gère. Quel est le facteur le plus important de la dynamique politique ? Est-ce le logos entendu comme discours ou la praxis, ensemble des activités déployées ? Entre le discours et l’action, il y a le mode de gestion de la Cité comme entité politique. C’est bien ici qu’il y a adossement à la violence à l’effet d’exister. Lequel des deux éperonne la violence ?

Bientôt s’ouvrira la période électorale. Si ce n’est déjà le cas au regard de ce qui nous est proposé d’observer. Les récits d’aventure des différents candidats déclarés, des personnages politiques historiques à l’élection du Président de la république et des autres élections constituent des objets matériels particulièrement nourris. Nourris parce que les narrations présentent plus d’atouts argumentés et argumentatifs susceptibles de provoquer un assentiment, d’accroître les preuves que tel ou tel candidat est le meilleur ou de récuser tel ou tel candidat ou formation politique. Ça y est, on est donc à un rendez-vous de grande pénétration avec des préliminaires qui font monter l’excitation, psychologiquement et physiquement bien ou mal préparés où chacun des états-majors de candidats, pour émoustiller l’électorat, doit démontrer sa valeur, doit faire preuve de certaines compétences qui, en fait, sont des talents. Tous se disputeront publiquement à la lumière du talent et à la lisière du triptyque logos-praxis-violence.

Je me propose de livrer dans les tous prochains jours à lecture, une analyse approfondie du discours politique sous les ci-après : historique et éthique, politique et idéologique, anecdotique, humoristique et ironique, esthétique, herméneutique dont ces quelques lignes ne constituent que les prolégomènes, l’avant-propos, la déclaration liminaire du projet d’essai sur l’évolution du discours politique en Côte d’Ivoire.

Théodore KONIMI

Enseignant-chercheur de stylistique, de rhétorique et analyse du discours

Université Félix Houphouët-Boigny

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