FICTIONS 

L’effet de mon répertoire.

J’ai eu le malheur d’ouvrir mon carnet de répertoire, j’en ai coulé des larmes. Beaucoup de mes parents et amis ne sont plus vivants, mais leur nom et numéros figurent dans ce carnet qui n’est pas mort.

Comme la vie est triste. J’ai laissé mon carnet de répertoire à Paris et je me suis absenté pour quelques mois. Je suis rentré. Mon numéro que tout le monde connaît n’est plus attribué, et c’est raisonnable, j’ai changé d’opérateur. Pour remettre mon téléphone à jour, je me suis souvenu de mon carnet où se trouvent tous mes contacts.

Ce carnet est alphabétique et je commence à le feuilleter. Depuis la lettre A à Z, j’ai perdu beaucoup de mes relations. La dernière qui me marque, c’est celle de ma propre mère, ensuite celle de mon informateur Eric Mobio qui vient d’être enfoui dans la terre il n’y a pas longtemps, samedi dernier.

La réserve et la surprise que la vie nous fait. Comme une massue dans mon dos, je sais que je ne suis pas le seul à faire cette observation et la tristesse m’envahit de savoir que plus jamais, je n’appellerai ces personnes chères à ma vie.

Est-ce que je peux considérer cette remarque de surprenante ? Je crois que quand on naît, on doit s’attendre à ces surprises. Comme si c’était eux-mêmes qui s’éloignaient de la vie, la mort les a contraints et jamais ils ne me répondront. Par contre les numéros eux, existeront, peut-être attribués à d’autres anonymes. Le son de ma voix et le leur aussi seront désormais dans les oubliettes, car emportés par le passé.

La mort, ses conséquences que l’on ne peut imputer à personne, c’est la reine de notre vie. Elle décide de quand elle veut agir, pourtant, elle est notre partenaire de tous les jours. Sa frappe est toujours triste et dans l’obligation, on s’aligne tous les weekends en rang long, parfois en uniforme, on fait des allées et venues sur le chemin des cimetières.

La mort, oui, cette voisine qui agit selon sa volonté, cette mort qui nous laisse dans la tristesse, chaque fois que je dois ouvrir mon répertoire, j’ai la chair de poule. L’effet d’une nostalgie à l’idée de lire ces numéros avec les noms de mes chers inexistants, disparus pour l’éternité, c’est ce chagrin que j’ai voulu partager avec vous.

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