Quand quelqu’un laisse, quelqu’un prend​

Le temps, on ne l’arrête pas et on le recule pas, on le vit. Heureusement que chacun et chaque chose a un nom, sinon, on allait faire comment ? Personne n’est assez grand pour maîtriser ce truc-là, l’amour avec son souffle impaire et son regard de piment-poussière.​

Selon elle, dans son salon, le seul savoir, doit-être, ma récitation et quand, je la récite mal, je suis un infidèle et quand, je la réussis, je viens de quelque part, mais à la fin, je deviens quoi ?

Elle est triste. Son mari ne la regarde plus. Pour lui, l’usure de ce beau corps d’hier, ce beau corps, est devenu, une chaussée dégradée avec des nids de poule et des dos d’ânes. Ce beau corps qui s’est donné à lui, ce corps qui l’a servi au quotidien, de ses allées et venues, dont son souffle nettoyait les herbes qui poussaient, qu’il bêchait pour trouver le chemin de son bonheur, ce corps, sur lequel, il s’entrainait, aujourd’hui, qu’il l’a détruit, il la rend responsable de cette usure. Ces dos d’ânes, ces nids de poule, c’est lui, l’auteur. Ce beau corps, n’est plus selon lui, admirable. Bon Dieu !​

Aujourd’hui, son regard s’est éloigné du sien. Elle attend quelque chose qu’elle n’aura jamais de lui. Sur son corps, oui sur ce corps, il accélérait, ralentissait et se bloquait parfois et elle le regardait ou du moins, elle le croyait à l’infini, dans l’affecte et l’admiration. Très souvent, elle l’accompagnait dans ce ballet pour atteindre son extase et quant à elle, son fantasme, tardait à venir et elle le vit étalé, ronflant pendant qu’elle veillait sur son homme. Oui, son égoïsme l’empêchait de la voir aussi heureuse. Ivre de son goût, gourmand de sa chair, il n’avait que pour tout et en tout, son ronflement qui la secouait, mais elle a fait avec.​

Il n’a plus de regard pour elle, ce regard, auquel elle s’est habituée, elle ne l’a plus. Il la fuie. Elle en souffre, mais il s’enfiche. Elle a tout entrepris. Elle a tout essayé. Elle a tout fait. Elle a tout mis. Elle s’échange, sans aucun effet dissuasif. Il ne la voit plus. L’autre, la regarde enfin et la chanson, quand quelqu’un laisse quelqu’un prend, resonne en sourdine dans sa tête. Il a le temps, pour une fois, l’occasion de l’autre, mais pour lui, non. Voilà que celui-là, la regarde, il a son temps. Il l’appelle tout le temps, plusieurs fois pour avoir de ses nouvelles. Il la rassure de sa beauté et apprécie l’odeur de son parfum qui venait d’embaumer la chambre, sans qu’il ne dise un seul mot. Son pianiste ne pose plus ses doigts sur son clavier.

Elle le cherche mais il est ailleurs. Elle seule se bat pour épargner les enfants de ce regard perdu et de la sécheresse dans le lit depuis des années, mais elle espère toujours. Elle porte son nom qui a volé sa dignité, elle compte les mots pour éviter les maux. Elle confond, son Dieu à lui, tellement qu’il le prie, jeûne, distribue des quêtes dans son église, elle n’a plus une seule goutte de sa sueur pour arroser ses sentiments arides dans un désert qui se rallonge.

Elle se sent en zone de contrôle et hésite. L’autre, attentionné, la désire et la complimente. Autrefois, les deux bouches collées et qui échangeaient leur odeur, leur eau pour rapprocher désire et fantasme et aboutir à la libido, aujourd’hui, sa bouche s’est asséchée et la langue s’est collée à son palais, au point où, prononcer, les anciens mots de je t’aime, sont devenus si durs que ça fait mal. Même la veilleuse, il l’éteint, pour ne pas la voir et c’est dans la pénombre qu’elle fixe mon regard pour chercher difficilement le sommeil pendant qu’il dort, profondément, avec son ronflement comme, une guitare basse associé à une batterie. Elle n’a plus de dignité et a honte. Elle ne me sent plus femme et pourtant, l’autre, la berce de son romantisme. Depuis quand, on ne lui a pas offert des fleurs ? Pour son anniversaire, l’autre, lui en a offert et non des moindres, des roses ardentes, qu’elle n’a pas pu faire entrer à la maison pour éviter des histoires comme s’il avait encore son temps.​

 Elle le voit venir et le sien, se fait beau pour cette inconnue qu’elle ne veut pas voir connaître et ça dure.​

Il la pousse dans les bras de l’autre, mais elle résiste, mais son regard s’est tellement éloigné qu’elle est devenue, comme un grain de sable qui s’éloigne comme dans un avion en décollage. La chanson, resonne dans sa tête, quand quelqu’un laisse, quelqu’un prend. Elle n’a pas eu d’amis à cause de sa jalousie et elle n’a pas envie que ses parents sachent qu’elle souffre. Elle se bat pour faire envie que de faire pitié.​

Ouf, elle est avec l’autre et tout est fait pour le délire, mais, elle n’est pas à l’aise et ne veut pas offrir ce corps si sacré, ce temple de son mari à celui-là, mais elle n’a pas le choix. Lui, est heureux mais elle non, elle lutte, mais, cela fait plusieurs années, qu’elle n’a pas mangé ce fruit. Elle en a envie, mais à l’idée d’ôter tout et se retrouvée comme un ver de terre, elle tremble mais le cache. Est-ce qu’il est gros, mince, long, court. Elle le repousse doucement feignant raconter que son dernier fils, n’a sans doute pas mangé, ne l’ayant pas vue. Mais, pour une fois, elle a senti, une salive, détacher, sa langue collée depuis des lustres dans sa mouche. Elle claque sa langue pour s’en convaincre, oui, il l’a tendrement embrassée et elle a senti, l’appel et l’envie. ​

Elle le sent l’étreindre comme une guitare cherchant ses notes pour la faire bien danser et elle le regarde et il est vraiment heureux. La première fois, rien, n’a filtré de leur rencontre, mais elle est partie, désirée. La deuxième fois, l’inhabituelle, devient une routine et elle arrive tôt et le temps de réaliser, son corps est redevenu, charmant et elle s’est sentie mouillée qui va lui permettre de rester longtemps, faire sa toilette, parce qu’elle est devenue femme. ​

                                                                                    Joël ETTIEN​

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