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LA CULTURE CRÉE DES LIENS ET OUVRE L’ESPRIT

En créant en 1959, un << ministère des Affaires culturelles >>, le général De Gaulle  envoyait un message puissant à la France et au monde: << La culture domine tout, elle est la condition sine qua non de notre civilisation …>>.

Sorti des interstices de « l’Éducation nationale », le Département est confié à André Malraux, ministre d’État, un ancien  résistant, compagnon de la Libération, écrivain et grand intellectuel, homme politique humaniste. Celui-ci a assuré, assumé et rassuré. Des décennies après, le Président François Mitterrand décrète « l’exception culturelle » puis parvient à faire admettre « la diversité culturelle » face au risque d’uniformisation culturelle du fait de la mondialisation/globalisation. Jack Lang, professeur de droit international, en a été l’architecte avec, de façon notoire,  « la fête de la musique » le 21 juin, chaque année.

Les grands États modernes sont généralement les plus attachés à leur passé, leur patrimoine, leur histoire pour exister et avancer fièrement et harmonieusement. Ainsi, la culture absorbe ou s’allie à la communication pour donner de la substance au message officiel et donner du relief à l’action  du gouvernement. Elle permet d’élever la conscience citoyenne et nationale pour bâtir une société de compréhension mutuelle, de tolérance, d’acceptation réciproque, dans le respect des différences. De la sorte peut être envisagé le développement dans la paix et la sécurité.
Le développement reste soumis aux aléas de l’incertitude et de la fragilisation dans la vie de toute nation. Les mentalités doivent donc être préparées à pouvoir faire face aux enjeux et défis de divers ordres.

Le développement intégral repose sur le socle d’une intelligence collective  rationnelle comme guide de l’action humaine orientée vers la liberté, le progrès, la responsabilité et la solidarité. C’est l’ouverture aux autres peuples qui favorise les échanges de connaissances et de techniques ou technologies pour entrer dans l’innovation.

Aussi, la culture se trouve bien dans  son rôle d’accompagnement démocratique pour une nation qui veut vivre, se construire et se consolider, au bénéfice de toutes ses composantes et de son environnement. La culture ouvre le chemin de l’humilité, cependant pavé de tentations et autres dérives auxquelles l’on ne peut résister, que par une haute  teneur éthique et une armature morale solide. L’épanouissement humain, c’est à la fois le pain et la liberté, le matériel et l’immatériel, l’epithumia et le noûs.

Le développement durable consiste donc en une sorte de  » trois en un »: économique et financier, social et éthique, culturel et spirituel. Le tiers facteur culturel est une condition indispensable pour s’inscrire utilement dans la durée. Le triptyque de développement souhaité est ce que le ministre Patrice KOUAMÉ, ancien ministre de l’Emploi et de la Fonction publique, de 1990 à 1993, précédemment Secrétaire Exécutif du Conseil de l’Entente, relève avec sagesse dans un ouvrage  paru en 2011. En effet, selon lui, << Gagner le pari du développement, c’est relever les trois grands défis : culturel, techno- économique , social. ( Patrice KOUAMÉ, Réflexions sur l’économie et les institutions politiques ivoiriennes, Frat Mat Éditions, Abidjan, 2011).

Le général De GAULLE proclamait et déclamait, notamment en créant l’ENA (École Nationale d’Administration) de France, en 1945: << La culture générale est la clé du commandement >>. Il estimait que la défaite de juin 1940 était largement due au manque de vision des chefs, civils et militaires, à l’absence d’anticipation et à  l’abaissement général de la société engluée, sous la IVè République, dans l’indifférence, la division, la corruption et les compromissions.

Des dirigeants sensibles au fait culturel et… à l’histoire, formés à la gestion de l’État, sont  plus à même de comprendre le caractère multidimensionnel de la gouvernance et du développement. Ils sont alors soucieux de valoriser toutes les qualifications et compétences dans la  réalisation d’une grande ambition nationale. La culture ne serait pas de trop dans le processus de réconciliation nationale en Côte d’Ivoire.

C’est par la mobilisation de tous, dans la solidarité et la complémentarité des différences, que se construit une nation forte, fière, performante et compétitive voire conquérante, pacifiquement. La culture crée et renforce le lien social et la citoyenneté, pour l’adhésion confiante aux institutions, l’équilibre durable ainsi que la dynamique de transformation heureuse de la nation.
                

Décembre 2022
                 Pierre AYOUN N’DAH
                 Docteur en Droit public   
       Ancien professeur à l’ENA  Abidjan 

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